C'était au premier trimestre 2009. Suite à la marche de Janadesh 2007, nous avions projeté de faire une tournée en Amérique Latine auprès des groupes de « Service Justice et Paix (Serpaj) ». Adolfo Peres Esquivel, fondateur ( Prix Nobel de la Paix 1980) avait envoyé la responsable internationale du Serpaj, Ana Juanche, à notre rencontre des mouvements gandhiens organisée par GI à Wardha à l'Institut d’Études gandiennes.
Notre équipe comprenant Christophe Grigri, pilier de GI, traducteur et chargé de mission, Ramesh Sharma, bras droit de Rajagopal et moi-même.
Adolfo nous attendait à Missiones, ville historique des Guaranis, nous venions du Brésil où nous avions participé au Forum Social à Belem 2009.
Quatre jours durant nous avons visité des communautés locales et entre autres, un village Guarani ouvert à l'esprit de non-violence. Lors de la discussion, Adolfo demande au chef du village ce qu'il pense du développement rural proposé par le gouvernement argentin pour les zones forestières proches du fleuve Paraguay.
Celui-ci lui donna une leçon de choses.
Entretien :
"Chez nous, le mot développement n’existe pas !"
"Alors quel mot pour se comprendre ?" reprend Adolfo.
"Chez nous il existe le mot "EQUILIBRE", équilibre avec le Cosmos, avec l’environnement, avec la Mère Terre, la Pacha Mama, équilibre avec les autres, avec soi-même, avec Dieu. Et c’est cet équilibre qui est la Vie."
"Et lorsque cet équilibre est rompu, alors commence la spirale de la violence et ses conséquences."
Notre civilisation occidentale est-elle équilibre ?
N’est-elle pas violence permanente ? Violence structurelle, violence de domination, de contrôle, de menace et de profit ? Est-elle autre chose que ce qu’on appelle dans toutes les traditions religieuses le péché ?
Je propose, après bien d'autres, puisque je l'ai reçue près de dix fois sur ma boîte Mail cette vidéo du discours d'investiture du Vice-Président Bolivien.
J'y ajoute ce commentaire de Satish Kumar, sujet britannique aujourd'hui, mais qui a connu Gandhi, est écrivain et l'auteur d'un livre remarquable « Tu es, donc je suis », qui vient contrecarrer d'une manière si humaine le « Je pense, donc je suis » de Descartes. Pour Descartes, le fait de penser définit le rôle du moi comme étant la source de l'être et comme désolidarisé des autres et donc justifie profit et domination.
Toutes les écoles de Commerce se développent autour de cette pensée qui est à l'origine de l'idéologie de l'ultra-libéralisme actuel.
Voici ce commentaire issu de la prédication de Vinobâ Bhave, disciple de Gandhi et surtout initiateur de Boudhân, ou don de la terre en Inde durant 14 ans. Il a marché de villages en villages, se présentant comme le dernier enfant de chaque famille pauvre et demandant aux riches sa part d'héritage pour une Inde solidaire et autonome. Il a récolté des millions d'acres (¾ d'hectare) à travers le pays qui furent distribués aux plus nécessiteux.
Dans le chapitre "Terre, âme et société", Kumar, en citant Vinôba, distingue trois éléments :
Le Yajna (sacrifice rituel, don de soi), le Dâna (devoir de charité, de reconnaissance de l'autre) et le Tapas (l'austérité, sobriété).
Le Yajna consiste à réparer le tort que l'Homme a causé à la Terre en lui restituant tout ou une partie de ce qu'Il lui a pris. Le cultivateur, par exemple, restitue à la Terre-Mère le compost et les éléments nutritifs. Le menuisier, lui, plantera des arbres. Éléments donc de retour et de respect après avoir pris quelque chose.
Le Dâna consiste à être éveillé sur le fait qu'à notre naissance chacun est nourri et élevé par la société des humains et qu'il s'agit de rendre quelque chose en honorant et respectant nos aînés car ils nous ont transmis l'art, la culture, l'expérimentation de la vie.
Enfin, il faut nourrir notre moi par des pratiques telles que méditation, étude, jeûne, repos, sommeil et le contact avec la nature, c'est le Tapas.
Sont-ce des choses enseignées actuellement dans nos systèmes éducatifs ? On enseigne surtout à prendre, à user, à consommer et à requérir des droits !
Ce président, dans son discours, reprend tout à rebrousse-poil, étonnant pour un homme de ce temps nourrit cependant d'une culture millénaire. Dieu soit loué ! Tout n'est pas perdu !
Bon visionnage de la vidéo et vous verrez qu'un monde nouveau n'est pas loin, il suffit de le vouloir et d'honorer des hommes politiques de ce calibre...
C'est fondamentalement Gandhien !... En espérant ne pas être déçus !
N.B Pour être conséquents, engageons-nous à ne pas acheter chez Amazon, à favoriser les artisans et les agriculteurs en bio. Et d'autres actions selon nos choix, pour correspondre à un monde qui change...